Question sur le fonctionnement
Autre(s) question(s)

Intéressé?

Souhaitez-vous avoir accès à de l'information pertinente en sécurité au travail, environnement et médecine du travail ?

Nouvelle étude : l’effort intellectuel entraîne un ressenti négatif

Actualités - 22/09/2024
-
Auteur(s): 
Edelhart Kempeneers


De récentes recherches montrent que les gens se sentent plus mal à mesure que l’effort intellectuel augmente. Cette constatation est importante pour les conseillers en prévention impliqués dans la conception de tâches, d’outils et d’environnements de travail qui impliquent un effort intellectuel. Il faut garder à l’esprit la relation entre l’effort et l’affect négatif lors de l’élaboration de stratégies pour la répartition des tâches et les conditions de travail.

Recherches sur l’impact de l’effort intellectuel


Une méta-analyse à grande échelle de 170 études menées auprès de plus de 4 600 participants issus de 29 pays confirme que l’effort intellectuel est souvent perçu comme désagréable. Les études couvrent un large éventail de tâches cognitives, telles que l’apprentissage de nouvelles technologies, la navigation dans des environnements inconnus et le travail avec des systèmes complexes. Les participants ont fait part de leur niveau d’effort intellectuel et d’éventuels sentiments négatifs tels que la frustration, le stress ou la fatigue.
Les résultats montrent une corrélation évidente : plus l’effort intellectuel est soutenu, plus les personnes ont un ressenti négatif. Cela est vrai pour toutes les tâches et toutes les populations étudiées, ce qui suggère que ces sentiments sont une caractéristique universelle de la charge cognitive. Ce constat est utile pour les professionnels chargés de concevoir des tâches et des environnements de travail, car un niveau élevé d’effort intellectuel peut affecter non seulement les performances, mais aussi le bien-être des travailleurs.



Image : graphique de la relation entre l’effort moyen et l’effet négatif moyen. Source : Delabre L et al.


Pertinence par rapport au domaine

Ces recherches ont des implications importantes pour les conseillers en prévention et les autres professionnels de la santé au travail. De nombreux travailleurs sont confrontés chaque jour à des tâches cognitives difficiles, telles que le traitement d’informations complexes, le travail multitâche ou l’utilisation de nouvelles technologies. Ces tâches exigent un effort intellectuel considérable qui, comme le montrent les recherches, peut entraîner un ressenti négatif, voire un épuisement intellectuel à long terme.
Toutes les tâches cognitives ne sont pas perçues comme ayant la même exigence, mais l’effort intellectuel a généralement un impact négatif sur le bien-être émotionnel. Cela signifie que lorsqu’ils conçoivent des tâches ou des environnements de travail, les employeurs et les concepteurs doivent être conscients de la charge émotionnelle que les tâches peuvent générer. En prenant cela en compte, ils peuvent contribuer à un environnement de travail sain et favorable.

L’effort intellectuel en tant que coût

Il ressort de théories dans les domaines de la psychologie et de l’économie que l’on a tendance à éviter l’effort, à moins que la récompense soit suffisamment importante pour justifier l’effort. L’étude soutient fortement cette hypothèse en montrant que l’effort intellectuel est perçu comme désagréable dans de nombreuses situations différentes, et ce que la tâche soit difficile, répétitive ou variée, ou que la personne qui l’exécute soit expérimentée ou non. Cela implique que l’effort intellectuel suscite intrinsèquement de l’aversion, même lorsque l’on choisit volontairement des activités intellectuellement éprouvantes, comme le sport cérébral ou les échecs.
Ceci s’explique par la différence qui existe entre l’effort lui-même et la récompense tirée de l’activité. On peut apprécier la récompense qu’apporte l’effort intellectuel, comme la maîtrise, le succès ou la compétence, mais cela ne signifie pas que l’on apprécie l’effort intellectuel lui-même. Cette compréhension est essentielle lors de l’élaboration d’environnements de travail et de tâches nécessitant un effort intellectuel soutenu.

Mesures que les employeurs peuvent prendre

Les employeurs peuvent prendre différentes mesures pour réduire l’impact négatif de l’effort intellectuel et favoriser le bien-être de leurs travailleurs. Voici quelques recommandations qu’ils peuvent prendre en compte lorsqu’ils conçoivent des tâches exigeantes sur le plan cognitif.

1. Soutien : il est essentiel que les travailleurs soient soutenus lorsqu’ils doivent exécuter des tâches ardues sur le plan cognitif. Ce soutien peut consister en des instructions claires, un coaching ou un accès à des outils qui rendent la tâche moins complexe. Les collaborateurs peuvent par exemple travailler plus efficacement et avec moins de stress s’ils disposent d’une technologie qui réduit la charge cognitive.

2. Structure et autonomie : les travailleurs sont plus efficaces s’ils ont une structure dans leur travail, comme des attentes et des objectifs clairs. L’autonomie dans la planification et l’exécution des tâches peut également contribuer à réduire la charge induite par l’effort intellectuel. Les travailleurs qui ont le contrôle de leur emploi du temps et de leurs priorités se disent souvent moins stressés et plus impliqués.

3. Alternance des tâches : les tâches monotones et répétitives peuvent être mentalement épuisantes. Les employeurs peuvent choisir d’alterner les tâches exigeantes sur le plan cognitif et des tâches moins pénibles afin de prévenir l’épuisement intellectuel afin non seulement d’améliorer l’équilibre mental, mais aussi de favoriser la productivité à long terme.

4. Récompenses et reconnaissance : lorsque l’effort intellectuel est inévitable, il peut être utile de récompenser les travailleurs pour leurs prestations. La récompense ne doit pas nécessairement être d’ordre financier : elle peut être une reconnaissance du travail accompli ou une possibilité d’évolution au sein de l’organisation. Valoriser les succès et donner du feed-back peut contribuer à renforcer la motivation et à créer un environnement de travail plus positif.

5. Culture de travail saine : enfin, il est important que les employeurs favorisent une culture du travail qui encourage la transparence en ce qui concerne la charge de travail et la charge cognitive. En organisant régulièrement des entretiens portant sur le stress au travail et la santé mentale, les employeurs peuvent intervenir à temps et offrir un soutien si nécessaire, ce qui contribue à l’employabilité durable des travailleurs.

Les conseillers en prévention et les employeurs jouent un rôle central dans la réduction des effets négatifs de l’effort intellectuel en prêtant attention à la conception des tâches et aux conditions de travail. Il est possible de réduire la charge cognitive des travailleurs en mettant en œuvre des stratégies telles qu’offrir un soutien, alterner les tâches et récompenser les efforts. Cela se traduit non seulement par un lieu de travail plus sain, mais aussi par une productivité accrue et un taux d’absentéisme plus faible. Les employeurs qui investissent dans un environnement de travail favorable et gratifiant peuvent compter sur des équipes motivées et impliquées.

Plus d’informations sur senTRAL :

Source :

  • David L et al. The Unpleasantness of Thinking: A Meta-Analytic Review of the Association Between Mental Effort and Negative Affect. Psychological Bulletin 2024, advance online publication.